Ces artistes-artisans des métiers d’art  ont imprimé de leur créativité le patrimoine de Fresselines. Fresselinois de souche ou sollicités pour leur savoir-faire, ils illustrent l’attachement de la commune et des associations locales à préserver le riche héritage artistique de Fresselines, tout en l’enrichissant d’œuvres contemporaines.

Danielle Bertholdt a sculpté le buste de Monet, placé sur un  piédestal en pierre de Didier Fauguet, l’église est riche des statues en bois  et du bas relief en pierre d’Anna Quinquaud, des vitraux de Didier Bourdeau et du coq en ferronnerie d’André Roy.

De nouveaux artistes-artisans diversifient les métiers d’art représentés à Fresselines. Bénedicte Clément, céramiste ; Pascal Deschamps, potier ; Frédéric Poczkajlo, luthier.

Anna

Pour commémorer les 130 ans du séjour de Claude Monet à Fresselines, « Les Amis de Fresselines » lui ont commandé en 2019, un buste en bronze par Danielle Bertholdt, diplômée de l’école des Beaux-Arts de Metz.
La plasticienne, enthousiasmée par cette commande car « il s’agissait de donner à voir le grand peintre à la fleur de l’âge, comme jamais à ma connaissance il n’avait été représenté jusqu’à présent en sculpture »  a donné vie à la 4e sculpture placée en plein air du maitre de l’Impressionnisme après celles de Rouen, Giverny et Honfleur. Pour répondre au souhait du commanditaire, représenter Monet à 49 ans, âge auquel il séjourna à Fresselines en 1889, la plasticienne s’est inspirée de deux documents : un autoportrait de 1886 et une photo en pied de  1889, créant, à partir d’éléments de chacun, un buste unique à cet âge

Ce portrait repose sur un piédestal en granit, offert par les Ateliers Maitre, réalisé par Didier Fauguet, sculpteur sur pierre de Saint-Plantaire, bourg tout proche, Meilleur Ouvrier de France, restaurateur de monuments historiques. Le bloc de granit rappelle le ruissellement de la Creuse avec, en façade, un petit tableau du confluent.

Didier Fauguet installant le buste de Monet sur le socle en granit, sculpté du ruissellement de la Creuse avec, en façade, un petit tableau du Confluent.

Deux statues en bois de l’église de Fresselines, sont l’œuvre de la sculptrice Anna Quinquaud (1890-1984).
Après avoir obtenu simultanément en 1924, le premier second grand prix de Rome et le prix de l’Afrique-Occidentale Française, décerné pour la première fois à une femme sculpteur, elle part en Afrique et y reviendra souvent. Son œuvre en sera profondément marquée par les ambiances et les natifs rencontrés ; elle enseignera également à l’Ecole des beaux-arts de Tananarive.
Sollicitée pour des commandes publiques, elle produira des chefs d’œuvre, installés tant en Afrique qu’en France : les quatre anges monumentaux au-dessus de l’entrée principale de la cathédrale de Dakar (1938), le bas-relief de la Maison de la France d’Outre-Mer de la Cité universitaire internationale de Paris, La Mauritienne statue en pierre de deux mètres du musée d’Art Moderne de la ville de Paris (1937), des panneaux décoratifs pour des halls d’immeubles, des séries de médailles pour la  Monnaie de Paris et bien d’autres. De nombreuses expositions présenteront son œuvre.
Pour son talent et son rayonnement, elle sera promue chevalier de la Légion d’honneur et élue à l’Académie des sciences coloniales, la première femme artiste à y entrer.
Ses célèbres bustes en grès, pierre, céramique.. expriment une gravité bouleversante et tout le respect et la tendresse d’Anna envers ses modèles africains.

Mais la nature creusoise, environnant la maison familiale de Lafat  où elle se ressourcera régulièrement, restera une importante source d’inspiration, souvent présente dans ses dessins et ses peintures.
Sollicitée par son ami creusois Pierre Dumont, elle réalise, en 1965, les deux statues en bois disposées de part et d’autre du vitrail du chœur, derrière l’autel de l’église de Fresselines : Saint-Pierre et Sainte-Thérèse. Pour l’anecdote, Saint-Pierre a une forte ressemblance avec son commanditaire et le choix de Sainte-Thérèse a réjoui les trois Thérèse – Duchiron, Logez et Roy –  alors piliers de la paroisse !

 

Pierre Dumont (1896-1987), dirigeant de l’entreprise de travaux publics Dumont & Besson, natif du Rivaud, commune de Fresselines, offrit en 1965 à la paroisse, l’autel en granit et l’aménagement du nouveau chœur. A sa demande, Anna Quinquaud sculpta le bas-relief de la chapelle, à gauche du chœur, en hommage à Marie-France, la fille de Pierre Dumont, décédée prématurément. La silhouette de la jeune femme flotte, accompagnée d’une colombe et  de l’inscription « Me voici, je viens».

Héritière d’une longue tradition familiale de bâtisseurs, débutée en 1812, on doit à l’entreprise  Dumont & Besson, l’embellissement et la modernisation de Paris, notamment avec la construction du Sacré-Cœur, de l’Hôtel de Ville, du Palais de Tokyo… Sous l’impulsion de son président Pierre Dumont,  l’entreprise participe, dans les années 1950, à la reconstruction d’après-guerre. Pionnière dans le domaine de la préfabrication, elle met en œuvre cette méthode, entre autre, dans la construction de logements à Orléans. Devenue la Compagnie Delacommune et Dumont, dirigée depuis 1989, dans la continuité familiale par  Pierre Dumont, petit-fils, l’entreprise, l’une des plus anciennes d’Ile-de-France, aborde son troisième centenaire en toute indépendance et avec sérénité.

 

Pour aller plus loin :
CONCHON Marie-Josèphe, Thérèse et Anna QUINQUAUD, la sculpture en partage, Les Ardents éditeurs, 2022.

« Les Amis de Fresselines » ont sollicité le maitre verrier Didier Bourdeau, réputé depuis plus de 50 ans, dans le domaine de la restauration de vitraux, d’édifices publics et privés, religieux ou civils en France et à l’étranger.
Egalement créateur et maitrisant plusieurs  techniques, il réalise pour l’église de Fresselines trois vitraux, utilisant la technique du  fusing, qui consiste à poser à plat sur un verre transparent, les couches de verre de couleur formant le dessin, ensuite fusionnées dans un four à haute température. Cela donne un vitrail visible recto-verso laissant largement passer la lumière, puisqu’aucune barlotière n’entrave sa diffusion.
Les trois vitraux forment une progression symbolique : le motif principal, au tympan de l’église, montre les attributs de Saint-Julien de Brioude, patron de la paroisse : le glaive et la palme du martyr, accompagnés de la main, rappel des maçons de la Creuse. Le sang rouge du martyr se répand d’un vitrail à l’autre avant d’atteindre une zone noire, les ténèbres, que le saint doit traverser pour gravir l’escalier bleu le menant au Ciel.
Une création qui associe la symbolique religieuse à l’hommage aux métiers traditionnels creusois.

Vitrail réalisé par Didier Bourdeau, maitre verrier, évoquant les symboles de Saint-Julien et des maçons de la Creuse.
Didier Bourdeau - Vitrail de l'église de Fresselines - Attributs de Saint-Julien, le glaive et la palme du martyr avec la mai, rappel des maçons de la Creusen

André Roy (1939-2021), héritier de cinq générations de ferronniers, a façonné cette matière inerte mais puissante depuis ses 12 ans. Après un apprentissage auprès de son père et un « tour de France » dans différentes entreprises, il s’installe à Fresselines en 1960, succédant à son père. Sa créativité le conduit à réaliser des ouvrages d’art uniques et originaux. Ses références sont nombreuses : le coq de l’église de Fresselines, les décors de films (Tous les matins du monde, L’enfant des lumières), des œuvres variées pour des musées, des châteaux, des Monuments historiques, également pour l’industrie… en France et à l’étranger. Il a également exposé pendant 10 ans à la section Prestige des Provinces de France du Salon de l’Agriculture.
Un talentueux artisan-artiste fresselinois.

Une nouvelle génération présente à Fresselines une vision de différents métiers d’art.

Bénédicte Clément, dont le grand-père était originaire d’Orsennes, vient depuis toujours  entre Creuse et Indre et habite maintenant le village de Chanteloube, sur la commune de Fresselines. Après une carrière professionnelle en tant qu’architecte et urbaniste en région nantaise, elle a souhaité changer de voie pour se diriger vers ce qui a toujours été sa passion, travailler la matière (porcelaine, céramique, grès). Après une formation, elle revient sur les terres de sa famille pour s’y consacrer entièrement. En mai 2021, elle ouvre l’Atelier de la Terre Blanche, à Gargilesse dans l’Indre.
Ses créations originales de bijoux, objets de décoration, vaisselle …, sont des pièces uniques raffinées, travaillées avec précision, gravées, émaillées, décorées, poncées. La qualité de son travail est récompensée par l’obtention du Label Ateliers d’Art de France.


Atelier : 23 rue du Père Moreau, 36190 Gargilesse (ouvert tous les jours durant la période estivale)

Pascal Deschamps, potier, est animé depuis les années 2000 par une curiosité et un perfectionnisme insatiables pour le travail de l’argile. Avec sa femme Laetitia, il a ouvert L’ Atelier-Boutique « Les Pots du Lézard », au centre du bourg.
Après un bac «Génie des matériaux», suivi d’un apprentissage de «Façonnier industriel», en 1999, où il apprend les étapes du processus de la fabrication industrielle de la céramique, il découvre sa vocation auprès de potiers « tourneurs de pots ». Enchainant BEP, apprentissages puis CAP « tourneur sur céramique » en 2001,  il continue à se perfectionner en atelier pour maitriser les difficultés techniques du tournage.
Comme il le constate « La poterie est un apprentissage de toute une vie qui vous enseigne la persévérance, l’opiniâtreté et surtout l’humilité ».
S’ensuit un tour de France dans plusieurs ateliers pour approfondir le travail des différentes argiles, techniques et modes de cuisson, avant d’arriver chez  Suzy Atkins, dans le Cantal, qui lui enseigne la technique du « grès au sel », qu’il va travailler pendant 5 ans avant de prendre son envol.
En 2018, répondant à une annonce, il devient l’animateur des ateliers poterie de la Tuilerie de Pouligny, (Creuse) accueillant  les scolaires et les particuliers. C’est la naissance de « l’Atelier du Lézard », devenu « Les Pots du Lézard ».
Désormais son aventure continue à Fresselines où ses projets ne manquent pas.
« Les Pots du Lézard » préparent une gamme de poterie culinaire et art de la table en « grès au sel » cuit au bois.
Cette technique consiste à travailler les engobes (argile liquide, aspect pâte à crêpe, teintée avec des oxydes de différentes couleurs, donnant au pot sa couleur finale après cuisson).
L’engobe est appliquée sur le  pot qui part en cuisson (une seul fois selon sa propre technique), lorsqu’il est bien sec. A environ 1200°, on envoie dans le four du gros sel de mer non raffiné qui, en fondant, se disperse et retombe sur les pièces, les émaille et les vitrifie. On parle alors de glaçure au sel. Puis les pots sont cuits à une température finale de 1280°/1300°.

Les Pots du Lézard
1, rue Maurice Rollinat
Tél. : 06 18 56 49 69
Mail : latelierlezard@gmail.com

Frédéric Poczekajlo, luthier est originaire de Grenoble. Après un CAP et un brevet des métiers d’art spécialisé en “facture instrumentale ” option guitare, il a travaillé dans un atelier de lutherie à Bruxelles. En 2021, il crée avec sa compagne, Pilar,  la marque Meta Guitars. Depuis décembre 2023, ils s’installent à la Chaise Gonnot, commune de Fresselines.  Après 6 mois de travail de restauration, ils ouvrent  leur atelier dans la maison mitoyenne de celle où il venait en vacances chez sa grand-mère.  Passionné par son travail, il crée de magnifiques instruments qu’il sculpte avec ses outils d’ébéniste, travaillant le châtaignier, le tilleul, l’aulne ou bien l’érable. Ses créations sont destinées à des activités pratiquées par des musiciens, avec une clientèle internationale. Spécialiste en “guitare basse”, il travaille également le métal et l’électronique.

Pour aller plus loin
– Un peu de folklore avec la Chanson des maçons de la Creuse,
Mémoires de la Société des Sciences Naturelles et Archéologiques de la Creuse, XXIII, 1940, p. 436-443.

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